L’information dont il est indiqué qu’elle est archivée est fournie à des fins de référence, de recherche ou de tenue de documents. Elle n’est pas assujettie aux normes Web du gouvernement du Canada et elle n’a pas été modifiée ou mise à jour depuis son archivage. Pour obtenir cette information dans un autre format, veuillez communiquer avec nous.
La nouvelle de l'assassinat de l'héritier du trône d'Autriche et de sa femme, dans les rues de Serajevo, capitale de la province de la Bosnie, le 28 juin 1914, frappa le monde de stupeur, comme un coup de tonnerre dans un ciel serein. À Vienne et dans d'autres villes d'Autriche, la population se livra à des démonstrations d'indignation et d'hostilité envers la Serbie. La presse gouvernementale autrichienne et allemande adopta immédiatement la théorie que ce meurtre était le résultat d'un complot tramé en ce dernier pays, nonobstant les déclarations de l'assassin qu'il avait seul prémédité son acte. Trois semaines d'un silence sinistre suivirent. Le 23 juillet, l'Autriche signifia à la Serbie un ultimatum, dont celle-ci ne pouvait accepter la totalité des termes sans renoncer à son indépendance; cet ultimatum comportait une sommation péremptoire d'acceptation totale dans les quarante-huit heures. Avant l'expiration de ce délai, la Serbie, agissant avec l'approbation de la Russie, fit connaître son acceptation de toutes les demandes de l'Autriche, sauf deux, qu'elle offrit de soumettre à l'arbitrage du tribunal international de La Haye.
Le 28 juillet, à midi, l'Autriche déclara la guerre à la Serbie par un télégramme ouvert et, dès la nuit suivante, les batteries autrichiennes de la rive gauche du Danube et les canonnières embossées sur ce fleuve commencèrent le bombardement de Belgrade, capitale de la Serbie; l'invasion de ce pays commença immédiatement.
Pendant ce temps, sir Edward Grey, ministre des Affaires Étrangères du gouvernement britannique, faisait d'énergiques efforts pour le maintien de la paix. Il proposa la réunion à Londres d'une conférence européenne. La France et l'Italie acceptèrent sans délai. Le gouvernement allemand répondit le 27 juillet qu'il accepterait la médiation « en principe », se réservant le droit de soutenir l'Autriche si elle était attaquée. Le 30 juillet la Russie ordonna une mobilisation générale de son armée. Le 31 juillet, à minuit, l'ambassadeur d'Allemagne à St. Petersbourg (maintenant Petrograd), présenta un ultimatum de son gouvernement requérant la Russie de commencer sa démobilisation dans les douze heures suivantes, c'est-à-dire avant le lendemain à midi. Aussitôt que cette heure eut sonné, les gouvernements allemand et autrichien ordonnèrent une mobilisation générale de leurs armées et de leurs marines, et le même jour, à sept heures du soir, la Russie fut informée qu'un état de guerre existait entre elle et l'Allemagne. Le même jour, le Président de la République Française signait un décret ordonnant la mobilisation générale, après avoir été informé que l'Allemagne avait signifié un ultimatum à la Russie et qu'elle commençait à mobiliser, manifestant ainsi l'intention de la France de rester fidèle à son alliance. Sir Edward Grey avait auparavant donné instruction à ses ambassadeurs à Berlin et à Paris de demander si, dans le cas d'une guerre, la neutralité de la Belgique serait respectée par l'Allemagne et par la France. Le gouvernement français répondit promptement dans l'affirmative, ajoutant toutefois que si cette neutralité était violée par une autre puissance, la France pourrait se trouver obligée de changer de tactique, pour sa propre défense. Le 2 août, le gouvernement allemand invita la Belgique à adopter une attitude de neutralité amicale, et de permettre le passage des troupes allemandes à travers son territoire pour faciliter l'invasion de la France, lui accordant un délai de douze heures pour faire connaître sa réponse. Dans la nuit du premier août les troupes allemandes avaient envahi le Luxembourg; dès le lendemain, elles occupèrent la totalité du duché et entrèrent en territoire français, près de Longwy. Le 3 août la France était informée par l'Allemagne qu'un état de guerre existait entre ces deux pays. Le lendemain, le gouvernement britannique envoya un ultimatum à l'Allemagne exigeant d'elle le respect de la neutralité de la Belgique, que le chancelier allemand avait déjà manifesté l'intention de violer. Avant la remise de cet ultimatum, des troupes allemandes étaient entrées en territoire belge en armes, et dès le lendemain, elles s'efforcèrent de s'emparer par surprise de la grande ville industrielle de Liège. Ayant méconnu la force et la valeur de la garnison, elles s'élancèrent en masses profondes et furent repoussées avec de lourdes pertes. En conséquence, le 5 août, le gouvernement britannique déclara l'existence de l'état de guerre entre la Grande-Bretagne et l'Allemagne, comme ayant commencé la veille à onze heures du soir. Il est à remarquer que tous les belligérants s'abstinrent soigneusement de toute déclaration de guerre formelle. L'Italie annonça son intention de demeurer neutre, pour la raison que la guerre entreprise par l'Autriche avait un caractère agressif.
Depuis de nombreuses années, les classes gouvernantes de l'Allemagne avaient été entretenues dans la croyance qu'une lutte gigantesque entre les grandes puissances de l'Europe était inévitable et qu'elle devait amener « la domination mondiale de l'Allemagne ou sa chute ». La nation allemande s'était diligemment préparée à cette guerre, en prenant toutes les mesures que permettaient les ressources du pays pour augmenter ses forces militaires et navales. Par exemple, le canal de Kiel avait été approfondi et constituait pour la marine allemande un abri sûr, avec des débouchés tout à la fois dans la mer Baltique et dans la mer du Nord. Avec raison on avait comparé le canal de Kiel à « un terrier de renard ayant deux entrées ». Une loi avait pourvu à une énorme augmentation de l'armée, mais elle n'avait pas encore été entièrement appliquée, et les préparatifs de guérie offensive n'étaient pas tout à fait complétés. Les stratèges allemands avaient étudié avec le plus grand soin tous les plans possibles d'invasion de la France, considérée comme leur plus redoutable adversaire. Il y avait trois routes possibles pour cette invasion; la plus courte, conduisant directement d'Allemagne en France, était barrée par une chaîne de grandes forteresses, à l'exception de l'étroite trouée de Mirecourt, entre Toul et Epinal. Les deux autres passaient par le Luxembourg et la Belgique, tous deux pays neutres. En fait, ces trois routes furent utilisées. L'invasion devait prendre la forme d'un formidable raz de marée sur le front le plus large, et devait conduire à l'enveloppement et à la destruction de l'armée française; on aurait dicté les conditions de paix dans la capitale. Les Allemands avaient la certitude de réussir en déployant une extrême rapidité de marche et une impitoyable énergie dans leurs opérations, combinées avec une supériorité numérique considérable. Us ne croyaient pas que l'armée russe puisse effectuer sa mobilisation en moins de six semaines, Que raison de la grande étendue de ce pays, de l'insuffisance de ses chemins de fer et de l'incapacité présumée de son gouvernement. La période de mobilisation de la France devait durer deux jours de plus que celle de l'Allemagne; il semblait donc possible aux agresseurs d'écraser d'abord l'armée française, et d'avoir tout le temps nécessaire pour se retourner ensuite contre les Russes. L'attitude que prendrait la Grande-Bretagne était une question de vitale importance pour les belligérants. Le chancelier allemand déclara nettement qu'il ne pouvait croire que la Grande-Bretagne risquât l'existence de son empire pour « un chiffon de papier », ainsi qu'il qualifia dédaigneusement le traité qui consacrait la neutralité de la Belgique. Si la Grande-Bretagne demeurait neutre, la supériorité des flottes allemande et autrichienne était telle qu'elle devait leur assurer la suprématie sur les mers. Les Français craignaient que l'Angleterre ne différât son action et que les secours qu'elle pourrait envoyer n'arrivassent trop tard. La déclaration du 5 août fut faite avec une telle promptitude, qu'elle devait supprimer toutes leurs appréhensions à cet égard.