L’information dont il est indiqué qu’elle est archivée est fournie à des fins de référence, de recherche ou de tenue de documents. Elle n’est pas assujettie aux normes Web du gouvernement du Canada et elle n’a pas été modifiée ou mise à jour depuis son archivage. Pour obtenir cette information dans un autre format, veuillez communiquer avec nous.
En décembre 1915, le général Joffre reçut le commandement de toutes les armées françaises et fut remplacé par le général de Castelnau dans le commandement des troupes françaises servant en France. Sir Douglas Haig succéda à sir John French dans le commandement des forces britanniques en France. Vers la fin de décembre 1915, le corps d'armée hindou fut transporté en Mésopotamie. Au commencement de l'année, les forces allemandes sur le front occidental étaient en nombre inférieur à leurs adversaires, mais elles occupaient des positions dominantes, qu'il était difficile d'attaquer. Pendant le mois de janvier leurs armées sur ce front reçurent d'importants renforts et reprirent l'offensive
sur plusieurs points, apparemment pour éprouver la force des positions des Alliés et maintenir ceux-ci dans l'incertitude quant à leurs intentions futures. Dans la matinée du 21 février, une formidable préparation d'artillerie commença dans le secteur de Verdun, suivie dans l'après-midi par une attaque menée par une nombreuse infanterie, laquelle emporta plusieurs des positions françaises de première ligne. Les assauts des Allemands se continuèrent durant les deux jours suivants et, le soir du 24, ils s'étaient emparés de la totalité de la première ligne des retranchements français sur la rive droite de la Meuse et avaient fait plusieurs milliers de prisonniers, mais au prix de pertes terribles. La garnison française fut continuellement renforcée et bien approvisionnée de munitions. On dit que quatre mille camions automobiles furent constamment employés à ce service, jour et nuit, et que deux cent mille hommes furent ainsi amenés sur ce champ de bataille. La lutte se continua avec des pertes effroyables de part et d'autre, presque sans arrêt, jusq'au 22 mars. Le fort de Douaumont, position importante, fut enlevé par les Allemands, mais à part cela leurs gains furent insignifiants. Entre le 22 et le 28 mars, la fureur de la bataille s'apaisa mais, à cette dernière date, les attaques furent renouvelées sur les deux rives de la rivière et se continuèrent jusqu'au 25 avril. Trois villages fortifiés qui avaient été convertis en un monceau de ruines par un ouragan de projectiles, furent pris; par contre, un grand assaut final échoua complètement et les assaillants ne réussirent jamais à approcher réellement des principales défenses de la place. Le combat recommença encore durant la première semaine de mai et dura jusqu'au premier juillet, sur la rive gauche de la Meuse. Le fort de Vaux fut pris le 6 juin, et le 9 juin cent mille hommes furent lancés sur un étroit front de trois milles dans un assaut désespéré sur les hauteurs de Thiaumont, où ils finirent par s'établir. L'offensive de la Somme causa une grande diversion de troupes dans cette direction, et à partir de ce moment, les Allemands durent rester sur la défensive dans ce secteur.
L'attaque, longtemps retardée, sur cette partie des lignes allemandes, fut précédée par un bombardement furieux qui se prolongea continuellement pendant cinq jours sur un large front, par de fréquents coups de main tentés la nuit pour constater ses résultats, et par la chasse donnée avec succès aux aviateurs allemands. Un grand nombre de leurs ballons d'observation furent détruits, et les avions alliés bombardaient les quartiers généraux divisionnaires et les principales gares de chemins de fer de l'arrière. Un ascendant décisif ayant été acquis dans ce secteur par l'aviation alliée, la concentration des troupes put s'exécuter avec tout le secret possible. Les forces britanniques ayant été considérablement augmentées, deux nouvelles armées furent formées. Elles purent relever les Français au nord de la Somme et occuper un secteur plus étendu. Le moment de l'assaut était fixé à 7 heures 30 minutes du matin, le premier juillet. Sir Henry Rawlinson commandait les troupes britanniques conduites à l'attaque, laquelle se produisit sur un front de vingt milles, contra les hauteurs de Thiepval. Les Français attaquèrent sur un front de huit milles, sur les deux rives de la Somme et à la droite de l'armée britannique; ils étaient sous les ordres du général Foch. À l'extrême gauche, l'attaque anglaise échoua en raison de l'insuffisance de sa préparation, mais la première ligne allemande fut pénétrée sur un front de seize milles, nonobstant une résistance opiniâtre, qui s'exerçait principalement à l'aide de mitrailleuses dissimulées dans des positions où le feu de l'artillerie ne pouvait les atteindre. L'attaque des Français réussit complètement sur tout le front, les Allemands ayant moins bien préparé leur défense. L'avance se continua les 2 et 3 juillet. Le 4, les opérations furent contrariées par de violents orages, mais les Français continuèrent à gagner du terrain. Les Allemands ayant reçu de grands renforts, commencèrent à contre-attaquer les troupes britanniques.
Le 7, une division de la garde prussienne fit une attaque désespérée sur la position qu'occupait l'armée britannique près de Contalmaison; cette attaque fut repoussée avec de grandes pertes, les assaillants laissant de nombreux prisonniers. Le combat se continua de jour en jour avec une grande furie; à la fin du mois, les Allemands étaient chassés d'une portion considérable de leur seconde ligne. Fréquemment, de petites positions étaient disputées avec la plus grande opiniâtreté. La bataille se continua pendant le mois d'août, quotidiennement, les alliés gagnant du terrain lentement mais constamment; cependant, ils ne réussirent pas à faire brèche. Le bombardement d'artillerie se continua avec une énergie sans précédent. Parfois quatre-vingt-dix mille obus étaient lancés en une heure par les canons des Alliés et, dans certains cas, un million de projectiles étaient tirés en vingt-quatre heures. De nombreux escadrons de cavalerie et des batteries d'artillerie à cheval se tenaient immédiatement à l'arrière, tout prêts à profiter d'une brèche dans la position ennemie. Le 3 septembre, avec vingt-huit divisions, les Alliés lancèrent une grande attaque, sur un front de quarante milles, qui obtint un succès considérable. Les 14 et 15 septembre, l'armée britannique se porta à l'assaut des positions allemandes près de Courcelette, qui furent emportées par la deuxième division canadienne. Un grand nombre de chars d'assaut lourdement cuirassés furent mis en action à cette occasion pour la première fois et avec un grand succès. Les pertes des Allemands furent extrêmement lourdes, car ils avaient massé leurs troupes pour une contre-attaque dans leurs tranchées de première ligne. Le 26 septembre, la première division canadienne s'empara de la tranchée de Hesse et d'autres troupes britanniques enlevèrent la grande redoute Hohenzollern, connue pour son système de défense perfectionné et réputée imprenable. Le lendemain elles emportèrent la redoute Staff et deux mille verges de tranchées contiguës; le 28 la redoute de Souabe, qui commandait la vallée de l'Ancre, tombait à son tour. Pendant la première semaine d'octobre, les opérations furent grandement contrariées par des pluies persistantes, mais le 7, les Anglais avancèrent de douze cents verges sur un front de huit milles. Le 24 octobre, les Français entreprirent une vigoureuse offensive, habilement préparée, près de Verdun, et reprirent Douaumont; en quelques heures ils avaient regagné à peu près tout le terrain qu'ils avaient perdu sur la rive droite de la Meuse depuis le commencement de l'offensive allemande, faisant plusieurs milliers de prisonniers non blessés. Ils se tournèrent alors vers le fort de Vaux, qui fut évacué par les Allemands le 2 novembre, après un furieux bombardement. Sur la totalité du front occidental la température de novembre fut tout à fait défavorable aux opérations militaires, les pluies incessantes ayant converti le pays en une mer de boue; cependant le 12 novembre les Français prirent Saillisel, forte position au nord de la Somme, et percèrent la quatrième ligne allemande. Le lendemain, favorisés par un épais brouillard, les Anglais attaquèrent des deux côtés de la rivière et occupèrent les retranchements allemands sur une profondeur d'un mille et sur un front de trois mille verges, faisant cinq mille prisonniers. Pendant le reste de l'année, il y eut de nombreux bombardements et des raids de tranchées, sans gains appréciables de part ou d'autre. Le 15 décembre, après plusieurs jours de préparation d'artillerie, les Français exécutèrent une attaque très réussie sur les lignes allemandes à l'est de la Meuse, près de Verdun; ils emportèrent leurs retranchements sur un front de six milles, prenant près de douze mille prisonniers et de nombreux canons.
L'offensive allemande sous Verdun avait été désastreuse pour eux. D'autre part, l'offensive des Alliés était également restée forte en deçà des objectifs qu'ils s'étaient proposés. Les deux opérations avaient coûté la vie à une multitude d'hommes et entraîné une énorme consommation de munitions.
Pendant les premiers mois de l'année, les conditions atmosphériques entravèrent les opérations militaires sur ce front. La neige était épaisse, et le temps brumeux ne permettait pas de se servir de l'artillerie; l'extrême aspérité de la contrée rendait excessivement difficile le ravitaillement des armées en présence. Au cours de l'hiver et au commencement du printemps, les Autrichiens avaient fait de vastes préparatifs en vue d'une offensive sur une grande échelle dans le Trentin, lorsque la température deviendrait favorable. En mars, toutes leurs positions principales furent assujetties à un feu d'artillerie nourri, afin de les empêcher d'envoyer des renforts sur le front français. Les Autrichiens avaient fait venir une grande quantité d'hommes du front russe et avaient conduit toutes leurs opérations dans un si grand secret que, lorsque leur principale attaque commença, les Italiens étaient mal préparés à la recevoir. Le 14 mai, les Autrichiens commencèrent un violent bombardement des positions italiennes sur un front très étendu; ils y employèrent plus de deux mille canons, dont huit cents de très gros calibre; parmi ceux-ci on comptait quarante obusiers de 420; 350,000 hommes avaient été réunis en vue de cette attaque. L'assaut de l'infanterie commença le 18 mai et continua à progresser dans les vallées de l'Adige et de la Brenta jusqu'au 2 juin; puis le front se stabilisa à plusieurs milles en arrière. Les Autrichiens prétendirent avoir pris 30,000 prisonniers et 300 canons. Pendant les deux semaines qui suivirent, ils continuèrent à attaquer les nouvelles positions italiennes, quotidiennement, dans différents secteurs, et une fois sur la totalité du front, mais ils ne gagnèrent que très peu de terrain. Trois divisions furent alors retirées en toute hâte pour s'opposer à l'offensive russe en Galicie. Le 25 juin, les Autrichiens commencèrent à battre en retraite sur une position choisie; cette retraite, protégée par de fortes arrière-gardes, ne s'effectua cependant qu'au prix de lourdes pertes. Les Italiens avaient projeté une offensive sur l'Isonzo, avec Goritz comme principal objectif, qui devait être déclanchée simultanément avec l'attaque des Alliés sur la Somme et l'invasion de la Galicie par les Russes. L'offensive des Autrichiens dans le Trentin retarda l'exécution de ce projet. L'attaque commença le 6 août et Goritz fut pris trois jours après. Les Italiens continuèrent à s'avancer jusqu'au 17 août, date à laquelle leur marche fut arrêtée. Leur offensive sur ce front recommença le 11 octobre; ce jour-là et le lendemain ils emportèrent plusieurs lignes de tranchées. Sur le plateau du Carso, de nouveaux avantages furent obtenus le premier et le deux novembre, une partie des retranchements autrichiens étant pris, avec de nombreux prisonniers. Le mauvais temps empêcha la continuation des opérations.
Au commencement de l'année, les Russes occupaient encore une position défensive en avant de leur voie ferrée, s'étendant depuis le golfe de Riga jusqu'à la frontière de la Roumanie, c'est-à-dire sur une longueur de sept cents milles. Solidement établis, ils repoussé rente toutes les tentatives que fit l'ennemi de percer leurs positions pour atteindre la ligne du chemin de fer. Le 23 décembre 1915, ils se portèrent à l'offensive pour détourner l'attention des opérations qu'ils projetaient dans le Caucase. De violents combats se livrèrent jusqu'au milieu de janvier 1916, le long des rivières Strypa et Styr, sans aucun succès important de part ou d'autre. Le 16 mars, les Russes s'avancèrent vers Vilna, tant pour soulager les défenseurs de Verdun que pour prévenir une offensive allemande dans le voisinage de Riga. Ils n'avaient encore réalisé que des progrès minimes lorsque le dégel mit fin aux opérations, à la fin du mois. En juin, les Russes lancèrent une grande offensive, avec trois groupes d'armées, sous la direction immédiate du Czar, ayant pour chef d'état-major le général Alexieff. Ce mouvement débuta par des attaques simultanées sur certaines portions de la ligne autrichienne, au sud des marais du Pripet, le 4 juin. Les deux armées autrichiennes attaquées durent se replier, abandonnant de nombreux prisonniers, principalement des soldats qui servaient avec répugnance et se rendirent volontairement, par unités entières. Lutsk fut pris le 6 juin et Dubno le 8. À ce moment, les Autrichiens reçurent des renforts considérables; il leur vint des troupes du secteur au nord des marais, des Allemands de l'armée de Verdun et des Autrichiens du Trentin, qui arrivèrent en toute hâte par chemin de fer. Les Russes évaluèrent leurs gains à 200,000 prisonniers et plus de 200 canons. Les principales armées autrichiennes étaient alors réduites à la moitié de leurs anciens effectifs. Les forces austro-allemande commencèrent leur contre-offensive le 16 juin et la continuèrent jusqu'à la fin de la première semaine de juillet, repoussant les Russes sur plusieurs milles. Le 4 juillet, les Russes attaquèrent avec un grand succès. Le 16 juillet, ils renouvelèrent leur attaque et s'avancèrent sur la ville de Brody, qu'ils prirent le 23. Leurs autres opérations plus au sud furent également fructueuses; ils réussirent à couper la voie ferrée faisant communiquer la Galicie avec la Transylvanie. Le 2 août, von Hindenbourg reçut le commandement suprême des armées autrichiennes et allemandes du front oriental, et sous son habile direction un vigoureux effort fut accompli pour arrêter les progrès des Russes. Durant le reste de ce mois, de nombreux combats indécis se livrèrent, à intervalles rapprochés.
Le 27 août, la Roumanie déclara la guerre à l'Autriche-Hongrie et surprit les passages des montagnes de la frontière transylvaine. Les succès récents remportés par les Russes avaient encouragé la Roumanie à épouser la cause des Alliés. Deux jours plus tard, l'armée russe du Danube commença sa marche vers le sud et traversa le Danube pour entrer en Roumanie. Le même jour, le feld-maréchal von Hindenbourg fut nommé chef d'état-major des armées allemandes en remplacement du général von Falkenhayn, qui prit le commandement des forces austro-allemande assemblées pour les opérations contre la Roumanie. L'armée roumaine envahit la Transylvanie, parcourant 50 milles en cinq jours. Elle occupa Kronstadt, la métropole commerciale de la province, et plusieurs autres villes importantes. Une armée composée de Bulgares, d'Allemands et de Turcs, commandée par von Mackensen, pénétra dans le territoire roumain au sud du Danube et remporta un succès considérable par la prise de la forteresse de Turtukai et l'occupation de la Silistrie. Mackensen livra ensuite une bataille qui commença le 16 septembre et dura cinq jours, mais il fut battu et obligé de se retirer à quelque distance. Au commencement d'octobre, les Roumains furent chassés de la Transylvanie et contraints de rentrer dans leur propre pays. Le 23 octobre, Mackensen s'empara de Constanza, le principal port roumain sur la mer Noire, et s'avança vers le grand pont qui traverse le Danube à Cernavoda, que les Roumains détruisirent. Au milieu de novembre, l'armée de von Falkenhayn força les passes des montagnes et s'avança sur Bucharest, le 3 décembre. Trois jours plus tard, cette capitale était occupée par les Allemands. Les restes de l'armée roumaine rejoignirent les troupes russes stationnées à l'est de la Roumanie et prirent de fortes positions défensives le long de la rivière Sereth.
Les Italiens avaient débarqué deux divisions en Albanie en décembre 1915 et s'étaient avancés jusqu'à Durazzo, qu'ils occupèrent jusqu'en février. Au commencement de l'année, une armée autrichienne envahit le Monténégro et s'empara de sa capitale, Cettinje, le 13 janvier. Dix jours plus tard, elle prit Scutari et marcha sur Durazzo, qui fut évacué par les Italiens et occupé par les Autrichiens le 26 février.
À une conférence des Alliés, il avait été décidé de conserver Salonique comme base indispensable à de futures opérations; pour la protection de cette ville, on construisit des travaux de fortifications, qui la couvraient au loin. Une partie considérable des armées alliées, engagées dans la péninsule de Gallipoli, furent transférées à Salonique, après l'évacuation de la Turquie. Les débris de l'armée serbe furent transportés dans l'île de Corfou, où ces malheureuses troupes jouirent d'une longue période de repos et de récupération dont elles avaient le plus grand besoin, après les privations et les souffrances de leur terrible retraite. Plus tard, ces troupes, s'élevant à plus de 100,000 hommes, furent transportées à Salonique pour y renforcer les armées alliées. Au commencement de septembre, les Alliés commencèrent une vigoureuse offensive sur un front de cent vingt-cinq mils et repoussèrent les Bulgares dans la direction de Monastir. Le combat, se continua, presque sans interruption, jusqu'au 19 novembre, date à laquelle cette dernière ville fut prise par les Alliés et devint la capitale temporaire de la Serbie.
L'armée russe du Caucase reçut d'importants renforts en décembre 1915 et janvier 1916. Ses opérations offensives furent hâtées considérablement par l'évacuation de la péninsule de Gallipoli par les armées franco-britanniques, qui libérait une importante partie de l'armée turque. Au milieu de l'hiver, sous le froid et la neige, elle marcha sur Erzeroum, principale forteresse turque de l'Arménie. L'armée turque, qui s'avançait pour la défendre, fut mise en déroute le 18 janvier, puis les Turcs évacuèrent Erzeroum le 16 février. Une autre armée russe, appuyée par la flotte de la mer Noire, s'empara de Trébizonde le 18 avril et la conquête de l'Arménie turque était à peu près terminée vers la fin d'août.
La division britannique commandée par le général Townshend était assiégée à Kut-el-Amara depuis le 3 décembre 1915. Plusieurs de leurs attaques ayant été repoussées, les Turcs décidèrent de réduire la garnison par la famine. Une colonne de secours, commandée par le général Aylmer, avait parcouru une distance considérable et chassée de plusieurs positions une force turque de couverture, mais elle fut immobilisée par des forces supérieures, le 23 avril. Le 25 avril, la division Townshend, réduite à moins de 9,000 hommes, dut déposer les armes.
La défense du canal de Suez était un objet de grande importance pour les Alliés. On avait placé des garnisons dans des postes établis à plusieurs milles à l'est du canal, pour tenir à distance les forces ennemies. Quelques-uns de ces postes furent attaqués au début de l'année et plus tard en août, mais sans succès. Les troupes britanniques commencèrent alors à s'avancer systématiquement le long du littoral, construisant un chemin de fer et une canalisation d'eau, au fur et à mesure des progrès de leur marche. Elles occupèrent une position dominante au cœur de la péninsule du Sinaï et les pilotes de l'aviation britannique bombardèrent plusieurs postes militaires turcs sur la frontière de la Palestine.
Dans les premiers jours de février un détachement allemand assez nombreux fut chassé du Cameroun, et contraint de se replier dans la Guinée espagnole, où il fut interné. La conquête de cette colonie fut complétée par la reddition de la dernière garnison allemande, le 18 février. Le général Smuts, qui commandait les forces britanniques dans l'Afrique orientale allemande, continua sa marche, qu'aucun obstacle ne put arrêter. Une autre colonne britannique, partie de la Rhodésie, envahit également ce territoire allemand. Les Allemands furent battus dans plusieurs petits engagements et leur capitale se rendit le 4 septembre. À la fin de l'année, environ un quart de cette colonie restait encore en leur possession.
Les Alliés possédaient la maîtrise absolue des mers. Aucun navire de commerce allemand n'osait s'aventurer sur l'océan. Les efforts accomplis par les Allemands pour la destruction du commerce des Alliés étaient limités aux activités de leurs sous-marins et d'un Unique croiseur léger. La grande flotte britannique, ayant sa base dans le magnifique havre de Scapa Flow, encerclé par les îles Orcades, tenait en sa possession la mer du Nord. Les passages qui conduisaient à cette baie étaient bloqués par des obstacles infranchissables, les deux entrées principales étant gardées par des batteries d'artillerie lourde et une double barrière de filets d'acier, munie d'ouvertures pour permettre le passage des navires. Un cordon de ballons d'observation surveillait constamment les airs au-dessus de ces îles. Des centaines de contre-torpilleurs et dragueurs de mines exerçaient une grande vigilance à l'extérieur. Abrités dans ce havre sûr, approvisionnées par d'innombrables vaisseaux charbonniers, allèges et vaisseaux à munitions de toutes sortes, les escadres de croiseurs, de croiseurs de bataille et de cuirassés, précédées par leurs éclaireurs aériens, partaient périodiquement pour explorer la mer. Toutes les unités de la grande flotte communiquaient entre elles par le moyen de la télégraphie sans fil.
Dans l'après-midi du 31 mai, la division des croiseurs de bataille de la flotte, composée de six unités, et commandée par le vice-amiral sir David Beatty, aperçut une escadre de cinq vaisseaux allemands similaires, qui se retiraient au sud-est sur le corps principal de la flotte allemande, alors hors de vue. Beatty leur donna immédiatement la chasse. Il était environ 2.30 p.m. Un peu plus d'une heure plus tard, l'action s'engagea à 18,500 verges. Quelques minutes après, une énorme colonne de fumée noire sortit des flancs de l'« Infatigable », qui fermait la marche de l'escadre de Beatty; cette colonne de fumée s'éleva à une grande hauteur et lorsqu'elle se dissipa le vaisseau avait disparu. Des neuf cents hommes de son équipage, on n'en put sauver que deux. Quelques instants après, plusieurs vaisseaux de la cinquième escadre de bataille britannique arrivèrent et ouvrirent le feu à 20,000 verges; on vit alors le troisième vaisseau de la ligne allemande en feu. Peu après le croiseur de bataille britannique « Queen Mary » sauta par suite de l'explosion de ses soutes; à l'exception de vingt personnes, son équipage d'un millier d'hommes périt entièrement. L'action se continuait sans avantages apparents de part ni d'autre depuis environ une heure lorsque l'on vit approcher trois divisions de la flotte de bataille allemande. Alors les escadres britanniques se mirent en mouvement dans la direction du nord-ouest, dans le but de se rapprocher de leur flotte qui était en route pour les rejoindre. Les croiseurs de bataille survivants étant doués d'une grande vitesse, ils purent aisément se retirer de la ligne de feu et traverser la route suivie par la flotte allemande, dans l'intention de dégager le tir de leurs propres cuirassés, pour se placer ensuite entre la flotte allemande et sa base. Comme conséquence de ce mouvement, la cinquième escadre de bataille eut à soutenir pendant quelque temps le feu de quatre croiseurs et de plusieurs cuirassés allemands. Toutefois, l'un des croiseurs allemands, avarié, se retira bientôt et ne prit plus aucune part à la bataille. À 6.20 p.m. la troisième escadre de croiseurs de bataille britannique, commandée par le contre-amiral Hood, apparut et s'approcha très rapidement jusqu'à 8,000 verges des cuirassés allemands. L'« Invincible », vaisseau amiral de Hood, fut bientôt coulé par un obus et tout son équipage périt, sauf dix hommes. Enfin sir John Jellicoe arrivait à son tour avec les deux autres escadres de cuirassés; ces vaisseaux se formèrent en ligne et chassèrent la flotte allemande de la scène de l'action. Le brouillard, la brume, et des nuages d'une fumée artificielle très dense aidèrent la flotte allemande à s'échapper, lorsque vint le soir. Durant la nuit, la flotte allemande fut surprise par des contre-torpilleurs et croiseurs légers britanniques, qui l'attaquèrent audacieusement et coulèrent nombre de ses unités. Les pertes ennemies furent soigneusement cachées à l'époque et n'ont jamais été, depuis, exactement connues. Le cuirassé britannique « Marlborough » fut touché par une torpille, mais réussit à rentrer au port. Outre les navires déjà nommés, trois croiseurs cuirassés et huit contre-torpilleurs britanniques furent coulés. On vit sombrer trois cuirassés allemands; un quatrième fut subséquemment ajouté à ce nombre, sur des témoignages certains. Le lendemain matin, la flotte britannique était encore sur la scène de l'action et, depuis lors, la flotte allemande ne s'aventura plus jamais hors de sa retraite, sauf en une seule occasion où elle retourna en toute hâte à son port, à l'approche de la flotte britannique.
Les attaques par les sous-marins allemands augmentaient en vigueur et en férocité. Des milliers de petits bateaux auxiliaires furent adjoints à la flotte britannique pour aider à les découvrir et à leur donner la chasse; on en détruisit beaucoup. Un transport français fut coulé dans la Méditerranée et plus de 3,000 hommes périrent. Deux cuirassés britanniques et un croiseur léger furent détruits par des mines ou par des torpilles et, le 6 juin, le croiseur « Hampshire », qui portait le feld-maréchal comte Kitchener, ministre de la guerre et son état-major, en route pour la Russie, fut coulé à l'ouest des îles Orcades; de tout l'équipage on ne put sauver qu'un officier subalterne et onze matelots. La destruction des navires de commerce appartenant aux alliés et aux neutres, soit par les sous-marins, soit par les mines, atteignait de graves proportions.
Au Canada, un décret ministériel rendu le 12 janvier porta la levée des troupes canadiennes à 500,000 hommes. De grands mais infructueux efforts furent faits pour atteindre ce nombre, au moyen de l'enrôlement volontaire. Une déclaration officielle publiée à la fin de l'année constatait que, depuis le commencement de la guerre jusqu'au 30 novembre 1916, le nombre des recrues s'élevait à 381,438 hommes de tous rangs et de toutes armes. Les contributions en argent aux différentes œuvres patriotiques avaient doublé.
Le 11 novembre sir Sam Hughes, ministre de la Milice, dont l'activité et l'énergie avaient grandement stimulé le recrutement et l'organisation de l'armée, offrit sa démission à la demande du premier ministre, à la suite de sérieuses divergences d'opinion en matière d'administration; il fut remplacé par l'honorable A. E. Kemp, ministre sans portefeuille. Une Commission du Service National fut établie dans le but d'augmenter les enrôlements, sans cependant nuire aux industries essentielles. Les troupes canadiennes en France furent portées à trois divisions complètes et constituèrent un corps d'armée, sous le commandement de sir Julian Byng. Des contingents considérables d'unités canadiennes affectées aux chemins de fer et aux opérations forestières furent aussi envoyés en Europe. Un grand nombre d'hommes s'enrôlaient dans les services spéciaux, dans les transports mécaniques et la navigation intérieure. Une brigade de cavalerie canadienne fut formée et, avec plusieurs batteries d'artillerie à cheval, fut attachée au quinzième corps d'armée britannique. Des garnisons de troupes canadiennes furent maintenues dans les Bermudes et à Sainte-Lucie.
Un document officiel publié par le gouvernement australien indiquait que 103,000 hommes avaient été recrutés par enrôlement volontaire en ce pays et envoyés en Europe; on se proposait d'en enrôler 100,000 de plus avant le premier juillet 1917, pour réparer les pertes subies par le contingent australien. Une loi de conscription fut soumise à Pélectorat en octobre, mais rejetée par une majorité minime.
L'Union de l'Afrique du Sud accomplissait avec succès la tâche qu'elle avait entreprise d'expulser les Allemands de ce continent. Les troupes de la Nouvelle-Zélande, qui étaient soit en Mésopotamie soit en France, furent maintenues à leur effectif normal par l'enrôlement volontaire.
Dans un discours qu'il fit en septembre, M. Bonar Law déclara que Terre-Neuve avait fourni, proportionnellement à sa population, un plus grand nombre d'hommes à l'armée et à la marine britannique que toute autre partie de l'Empire. Il résulte d'informations émanant du département de la Milice de Terre-Neuve que cette colonie a donné 12,132 hommes sur une population de 256,290 habitants; 7,312 autres avaient offert leurs services, qui n'avaient pas été acceptés.
Outre un corps d'armée entier envoyé en Mésopotamie pour secourir les troupes assiégées de Kut, des troupes hindoues furent expédiées en Égypte pour la défense du canal de Suez, dans l'Afrique orientale, le Cameroun et le sud de la Perse; de plus, l'Inde fournit des garnisons pour les îles Maurice et Singapour, de même que pour la défense d'Aden et des nouveaux postes établis sur la frontière afghane. Des contributions très élevées aux fonds patriotiques furent données par les chefs indigènes et les nobles.
La grande disette d'aliments en Autriche et leur cherté causèrent de graves mécontements. Le gouvernement de ce pays établit un contrôle plus sévère sur les denrées, et interdit la consommation de la viande pendant trois jours par semaine. En Allemagne, une commission de répartition des aliments fut créée, avec des pouvoirs fort étendus. Les cartes de viande devinrent obligatoires et l'on fixa le maximum de la ration de viande. Les émeutes causées par le manque de nourriture devinrent fréquentes. À la fin d'octobre, on créa un ministère des munitions et on passa une loi de conscription civile, obligeant tous les hommes valides entre les âges de 18 et 60 ans, non mobilisés, à travailler aux industries de guerre.
En France, le cabinet fut réorganisé et les services de guerre concentrés entre les mains d'un conseil de cinq membres. Le poste de commandant en chef des armées fut aboli. Le général Joffre fut nommé conseiller technique du gouvernement, fonction qu'il abandonnait peu de temps après. Le 12 décembre, le général Nivelle fut nommé au commandement de toutes les armées opérant en France; le général Sarrail, commandant de l'armée de Salonique, était placé sous les ordres directs du ministre de la Guerre. Une loi fut promulguée accordant des primes à la culture du blé.
Après un bref débat, une loi de conscription fut passée par le gouvernement de la Grande-Bretagne, le 24 janvier; l'Irlande fut exclue des dispositions de cette loi. Cette mesure ajoutait 750,000 célibataires aux forces militaires.
Au premier juillet 1916, trois millions et demi d'ouvriers des deux sexes étaient occupés aux fabrications de guerre, dont 660,000 femmes ou filles; 4,000 usines ou fabriques produisaient des munitions sous la direction du gouvernement.
Une conférence économique des gouvernements alliés eut lieu à Paris en juin; plusieurs mesures rigoureuses y furent adoptées.
Le Vendredi Saint, 21 avril, un sous-marin allemand débarqua sur la côte de Kerry, en Irlande, sir Roger Casement et quelques compagnons, ainsi qu'une petite quantité d'armes. Casement fut arrêté peu de temps après, avant qu'aucun rassemblement d'hommes ait eu lieu pour se porter à sa rencontre ou faire usage de ces armes. Toutefois, une sérieuse insurrection se déclara à Dublin le 24 avril. Des insurgés, organisés en détachements, prirent possession du bureau de poste, du palais de justice, des gares et de plusieurs maisons contiguës. La force armée dut livrer combat à ces rebelles pendant plusieurs jours avant de les subjuguer. Des soulèvements moins graves eurent lieu dans plusieurs petites villes de l'Irlande, mais furent bientôt étouffés. Un certain nombre de prisonniers traduits devant le conseil de guerre furent condamnés et exécutés. Casement fut pendu à Londres le 3 août.
En décembre, le cabinet britannique fut réorganisé; le très honorable David Lloyd George devenait premier ministre. Une commission spéciale de guerre fut formée, composée de cinq membres et présidée par lui.
Le 23 février, le Portugal saisit un grand nombre de vaisseaux de commerce allemands qui se trouvaient dans les ports portugais depuis le commencement de la guerre. Quatre jours plus tard, l'Allemagne protesta contre cette saisie, puis, le 9 mars, elle déclara la guerre au Portugal. Le gouvernement portugais annonça qu'il avait agi de la sorte « à cause de notre alliance avec l'Angleterre, une alliance qui s'est constamment perpétuée depuis cinq cents ans. » Des troupes portugaises coopérèrent avec les troupes britanniques de la Rhodésie pour chasser les Allemands de la contrée méridionale de leur colonie de l'Afrique orientale. Une division de troupes portugaises fut envoyée en France pour y combattre dans les rangs de l'armée britannique.